De plus en plus, dans notre univers numérique, nous sommes appelés à “accepter”. J’accepte de créer un compte, les identifiants, les codes secrets. J’accepte de livrer un peu de ma personne. J’accepte des conversations avec des virtuels qui me bipent, me sermonnent, me conseillent, me scrutent, m’évaluent, me boostent et peuvent même devenir mes amis. J’accepte de nourrir ces voraces algorithmes secrètement enfouis dans les services et les serveurs. Nos secrets, nos pensées, nos péchés se détachent en longues bandes de chiffres, de codes cryptés que nous ne savons même pas lire et qui se transforment en substance qu’on nous vend.
Avec l’humour et la légèreté profonde qui est la leur, le Groupe Merci s’empare de ce beau sujet pour le théâtre et nous démontre le lien entre l’abstraction froide de ces algorithmes et notre réalité sensible d’êtres humains. Dans un jeu jubilatoire et d’une précision maniaque, les comédiens se livrent à une performance physique ahurissante révélant toute la puissance corrosive de ce texte.
Depuis toujours, dans des scénographies minutieuses et étonnantes, le Groupe Merci s’attaque à des textes en prise avec les bouleversements politiques et anthropologiques actuels. Nous nous rappelons ici Trust de Falk Richter et Européana de Patrick Ourednik.